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Le couple - des dépendances à l'autonomie
Date de publication : 1 Novembre 2010
Catherine Marjollet (Colloque Février 2008)
A mes yeux, quand nous ne sommes pas séparés, nous sommes en dépendance(s) donc en liens négatifs, en proie à l'angoisse de séparation, consciemment ou inconsciemment. L'indépendance n'est pas l'autonomie puisque l’indépendance est absence de liens. L'autonomie, en revanche, est la constitution de liens positifs à soi et à l’autre. Cependant, pour les assumer pleinement, la prise de conscience et l’élaboration incessante des liens négatifs à l’autre est nécessaire, notamment dans cette relation privilégiée et particulière que constitue la relation de couple. Passer des dépendances à l’autonomie pour un couple revient à passer des passions ou des tensions à l’harmonie, ce à quoi peut arriver le couple en traversant les crises et en élaborant principalement l’angoisse de séparation.
Je construirai mon propos sur l’ouvrage de Serge Hefez “La danse du couple” et je l’illustrerai par moment avec le questionnement issu de ma pratique clinique sur le couple.
Sophie et Patrick viennent me consulter après de nombreuses scènes de ménage au cours desquelles la violence verbale et physique est agie dans à peu près tous les espaces de la maison. Au bord de l’épuisement, ils livrent un constat commun : “Nous allons nous tuer !”. La crise du couple, autour de trahisons et d’adultères respectifs, bat son plein. Néanmoins, ils n’envisagent pas de se séparer… Alors ils s’agrippent et se détruisent…
Quand le programme de ce colloque a été évoqué, le thème du couple s’est imposé à moi car le couple représente la relation où s’exerce la quête renouvelée de l’équilibre entre l’angoisse de séparation et le désir d’autonomie et de réalisation.
S. Hefez signale cette double contrainte dans la rupture de couple, donc dans le besoin de séparation qu’il condense dans la formule : “Ni sans toi, ni avec toi”. Le couple oscille entre stabilité et changement, mythe du prince ou de la princesse charmante et individualisme forcené. Que demandent les partenaires d’un couple qui viennent consulter ? La plupart des demandes de psychothérapie de couple concerne le risque de séparation, le vécu de séparation, les suites de la séparation plus précisément les conséquences de la rupture, quand le couple est fâché. Quant aux crises de couple, la plupart des plaintes concerne le besoin d’indépendance et le sentiment de frustration, le besoin de dépendance et ce même sentiment de frustration ou encore, bien souvent, l’association de ces deux besoins. Son désir à soi et le désir de l’autre ne sont plus vraiment pris en compte. Le travail thérapeutique de couple doit permettre non seulement de se retrouver, soi, mais encore de faire redémarrer le couple, sur de nouvelles bases.
La clinique du couple concerne la demande thérapeutique des partenaires d’un couple et son suivi. Elle est omniprésente dans nos cabinets car, individuellement aussi, chaque personne parle de son couple, de ses couples, de son désir de couple… Un adulte parle sans cesse de couple ! J’illustrerai avec différentes situations réelles de couples : homme-femme, femme-homme, femme-femme, homme-homme… mais également avec différentes figures psychiques de couples : le couple fusionnel, le couple narcissique, le couple clivé, le couple polygame… Je me bornerai cependant à des situations de couples sexualisés, là où le désir sexuel s’exprime. J’envisagerai ici uniquement le couple, dans la conjugalité, même quand celle-ci est éphémère comme dans les relations sexuelles ponctuelles.
Même les enfants vont parler du couple ; la plupart d’entre eux fréquentent mon cabinet parce qu’ils vivent mal la rupture de leurs parents. Ils ont besoin de savoir de quel couple ils viennent.
Quelle est la demande thérapeutique de ce partenaire, de ces partenaires et du couple en tant qu’organisme ? Quelles souffrances s’expriment dans leur plainte ?
Frédérique commence une psychothérapie quand elle pressent la rupture de son couple. Pourtant, de son point de vue, ses adultères ne prêtaient à aucune conséquence car son mari les ignorait, absorbé qu’il était dans son “mariage” professionnel avec Gérard, son meilleur ami. La réalité lui éclatera en pleine figure quand elle apprendra qu’il la trompait de son côté depuis un an avec sa meilleure amie à elle, la femme de Gérard. Tout explose. Pourtant, Frédérique s’agrippe : “Rendez-moi mon couple !… qui n’existe pas”. Elle se refuse à quitter son couple fusionnel idéal. Sa plainte est un cri. L’idéal placé sur son couple ne peut être perdu car alors son mensonge existentiel serait démasqué, celui qui correspond à son besoin psychique de perpétuer une relation fusionnelle à sa mère disparue. La séparation est insupportable…
C’est le sous-titre de mon intervention en référence au film “Cuisine et dépendances”. Les espaces du couple m’intéressent car ce sont des scènes d’échanges spécifiques qu’il est important de visiter avec les deux partenaires. Il nous faut connaître le décor du couple et ses déplacements, ses pérégrinations et ses aventures pour comprendre ce qui ne va pas. Parfois, nous “attrapons” par-là une des clés fondamentales du problème.
La cuisine est le lieu de l’oralité. La cuisine est aussi l’espace de dialogue du couple, là où réside la mise en paroles de l’intimité, souvent aussi l’espace des décisions. Quel est le régime affectif du couple ? Qui décide de quoi ? Que se disent les partenaires du couple ?
L’autre espace de l’intimité est celui de la chambre, là où réside aussi le sexuel. La sexualité est LE langage du couple qui ne trompe pas, c’est le langage émotionnel du couple. Un couple n’existe pas sans sexualité. Parfois, le conflit du couple ne s’exprime que dans la sexualité. Le relais d’un sexologue peut être alors précieux.
Enfin, l’espace du salon est l’espace de convivialité et de socialité, là où les membres du couple vont exister par rapport aux autres et mettre en scène leur rapport amoureux, y compris dans leur structure familiale.
Comment chaque partenaire vit-il la sexualité dans son couple ? Comment s’y exprime les désirs ? Comment sont investis les différents espaces et quelle est la place de chacun ?
Jérôme vient consulter car il ne se “remet” pas de la séparation d’avec son compagnon avec qui il a vécu 7 ans. Cette rupture lui semble incompréhensible : “Je lui ai tout donné”. En effet, ses revenus subviennent à tous les besoins, mais vraisemblablement pas à tous les désirs. Il a offert à son compagnon Cédric, une belle maison, une belle piscine, une belle voiture… Mais Jérôme ne comprend pas que Cédric souffre tellement de la discordance entre eux du fait qu’il ne parvient pas à retrouver un emploi. Tout l’espace de la maison est envahi par le paraître, par-être, de Jérôme. Il vit un couple narcissique, où tout en ayant le sentiment de tout donner à l’autre, lui seul existe. Son couple doit également briller aux yeux des autres et faire figure de modèle. Un miroir a été une polémique entre eux car c’était le seul objet de Cédric. Et Jérôme, sans le “faire exprès”, l’a brisé… Cédric, avant son départ, s’était retranché dans le seul espace non contrôlé, l’ordinateur… Mais Jérôme n’a rien vu venir, absorbé par son propre miroir psychique.
Un couple s’inscrit dans la durée. Il y a le temps de la rencontre avec ou non le “coup de foudre”, puis le temps de la passion amoureuse ou période amoureuse, puis le temps de la transformation de cette rencontre en liens affectifs amoureux positifs et négatifs, ambivalents, pour constituer l’amour à deux. Viennent ensuite aussi les projets communs, dont celui de la famille. Or, dans le couple, nous retrouvons bien souvent inconsciemment une tentative de recherche d’équilibre entre dépendances négatives et indépendance. Les dépendances négatives s’illustrent par exemple dans la fusion à l’autre, la consommation de l’autre, l’agression à l’autre, la désertion de la relation… La dépendance négative œuvre quand nous ne parvenons pas à être avec l’autre. Nous connaissons tous tellement bien la compulsion à la répétition, la tendance inconsciente à répéter son histoire inlassablement pour tenter de la comprendre et de la dépasser. Ainsi, venons-nous rejouer dans nos couples toutes les dynamiques de notre histoire à chacune de ses étapes. Nous nous battons contre l’autre sans cesse, contre les dépendances négatives sans pouvoir constituer pour autant de véritables dépendances positives, sans pouvoir néanmoins ménager l’espace et le temps nécessaires entre les deux partenaires pour qu’existe véritablement un couple constitué de trois membres : chacun des partenaires et le couple, c’est-à-dire, l’espace et le temps de rencontre des deux partenaires et, par ailleurs, deux espaces et deux temps pour chacun des adultes autonomes de ce couple. Vaste programme !
Un couple mature peut se constituer, lorsqu’il a élaboré les conflits, négocié des compromis, alimenté le lien et s’est épanoui dans la sexualité, alors seulement, le temps de la dépendance positive et de l’harmonie est peut-être arrivé. Cet enchaînement n’est pas immuable, j’évoque plutôt des temps de maturation psychique du couple à l’aulne de la maturation psychique de toute personne. Comment le couple s’inscrit-il dans le temps et se raconte-t-il son histoire ? Quel est le roman amoureux et sexuel de ce couple ?
Katia et Jean-Yves me sollicitent après 7 ans de relation et l’arrivée d’une petite fille de 3 ans, pour les aider à décider de l’avenir de leur couple, bien qu’ils vivent déjà séparés depuis quelques mois. La rupture s’est profilée à la naissance de leur fille car il s’avère que le projet d’enfant est son projet à elle, dont il est, inconsciemment, bien écarté. Chacun travaille sa responsabilité : elle, dans son ambivalence à réclamer sa présence de père ; lui, dans son ambivalence à ne pas avoir cherché à prendre sa place. La séparation se réalise après l’emménagement dans la maison qu’il a entièrement conçu –il est architecte. Katia ressent une impossibilité à prendre sa place dans sa maison à lui… Mais concernant le temps de ce couple, il est surprenant de voir à quel point ces partenaires ont des rythmes si différents. “Nous avons toujours vécu séparés”. Ils ont cohabité dans un même espace mais chacun dans un temps différent de celui de l’autre, rendant impossible la constitution de projets décidés et vécus en commun. Ils sont en décalage temporel permanent. Autant sur la question de l’espace du couple, se joue la symbolique “d’une place pour deux” ; autant sur la question du temps du couple, se joue la symbolique “du rendez-vous manqué”.
L’angoisse de séparation est l’angoisse que nous devons surmonter pour conquérir notre autonomie. Ses illustrations typiques dans le développement de l’enfant sont l’angoisse du 8ème mois et la sensation de manque (passage du 1 au 2) ; l’étape du non à deux ans et le sentiment de frustration, la conquête de la socialisation et du langage (passage du 2 au 3); la castration œdipienne et la constitution du Surmoi et l’entrée dans les apprentissages donc dans le symbolique (passage du 2 au 3 mais dans la dynamique de séduction/rivalité et passage au groupe) ; le développement corporel et la flambée pubertaire ; la maturité sexuelle adolescente et le départ de la famille ; la constitution d’un couple… Dans ce couple qui me parle, où se situe pour chacun et pour le couple l’angoisse de séparation, dans leur histoire respective et dans celle du couple ?
Dans le couple, les corollaires de l’angoisse de séparation sont : le besoin fusionnel à l’autre et le besoin de possession/destruction de l’autre. Quand un couple dysfonctionne ou ne peut perdurer, c’est qu’il est dans la fusion : il n’y a qu’un organisme ; cette unicité nous rappelle la vie intra-utérine. Ou bien, il est dans la relation duelle, dans la projection positive ou négative, d’un point de vue narcissique, dans des identifications projectives. Il n’y a pas vraiment d’espace transitionnel au sens du Jeu-Je-Nous. Il y a l’autre comme objet transitionnel, comme doudou, pour compenser ou bien l’autre comme objet contra-phobique, pour lutter contre l’angoisse de séparation. L’espace transitionnel du couple est alors narcissique et est constitué comme un labyrinthe de miroirs ou une salle d’armes pour guerroyer. Projections négatives ou positives : il n’est pas prévu de se séparer c’est-à-dire de s’éloigner et d’exister en tant que personnes. Si l’autre s’éloigne, je le colle ou je le tue. Pour ne pas subir la séparation, je l’agis, moi d’abord, donc je pars et je quitte l’autre. Autant de scenarii possibles.
Je voudrai signaler que deux fantasmes habitent le couple : le fantasme de retrouver la passion et celui de vieillir ensemble. Ce sont deux fantasmes de lutte contre l’angoisse de séparation.
Comment aider tel couple à élaborer la séparation, à la dépasser en tant qu’angoisse et à se constituer dans un couple renouvelé ?
Carine est mariée et a deux enfants. Elle a une maîtresse, femme mariée elle aussi avec des enfants. Elle est écartelée entre son identité de femme et celle de mère. Une manière que nous utilisons pour lutter contre l’angoisse de séparation est de construire une vie où nous tentons d’avoir tout. Cette angoisse est pourtant toujours là et l’autonomie ne peut être envisagée. “Je voudrais la partenaire idéale composée de ce qu’il y a de mieux chez chacun de mes partenaires”. Le couple polygame semble ici et pour l’instant la seule réponse acceptable à l’angoisse de séparation.
La clinique du couple consiste à comprendre les identifications et les projections dans le couple, à permettre à chacun de nommer ce qu’il ou elle est mais aussi ce qu’il ou elle est devenu(e) depuis la rencontre ; à décrire les espaces-temps du couple, les frustrations et les concessions. La réalité semble tout envahir et revêtir une urgence, mais c’est pour mieux recouvrir l’espace symbolique des langages du couple et l’espace imaginaire des fantasmes du couple. Nous devons travailler beaucoup sur ces deux espaces pour connaître la vie psychique inconsciente du couple ainsi que sur le temps du couple, c’est à dire sur le roman de ce couple.
Il est fondamental de ne pas oublier non plus que le couple représente l’intensité du besoin émotionnel idéal, représentation intense et particulière à notre époque, d’où une quête insatiable du partenaire idéal -ou l’inverse dans le renoncement- et une potentielle errance amoureuse et sexuelle. Nombre d’adultes recherchent inlassablement le partenaire idéal et complémentaire, qui va venir combler tous leurs besoins et tous leurs manques. Le travail thérapeutique du couple correspond à l’élaboration de la perte psychique de cette illusion, de cet idéal, pour permettre au couple non seulement d’affronter le manque et l’angoisse de séparation mais encore de retrouver à la fois l’autonomie respective et celle du couple par rapport à la famille. Le couple est une relation qui a besoin d’être alimentée, choyée, développée, entretenue…
L’espace thérapeutique doit devenir l’espace de jeu du couple, un lieu de remise en questionnements donc un lieu de réanimation des échanges du couple, pour gérer les menaces intérieures et extérieures et pour développer un nouveau projet de couple. Il faut envisager, avec les membres du couple, les réaménagements et réengagements possibles et permettre qu’un espace transitionnel mature du couple, autre, autonome et créatif, puisse se constituer.
Comment la parole et les liens du couple peuvent-ils se reconstituer dans le cadre thérapeutique ?
Lydie formule sa demande thérapeutique autour de l’urgence de la réalité. “C’est urgent ! Dites-moi ce que je dois dire à mes enfants pour annoncer notre séparation”. Elle se sépare après une année chaotique, génératrice de grande souffrance pour elle, car elle se sent profondément trahie par son mari qui vit une autre relation. Elle avait investi massivement son identité de mère en désertant progressivement son identité de femme. Son mari lui adressait fréquemment des reproches sur son manque de désir et de plaisir sexuels. La relation affective privilégiée était devenue unilatéralement pour elle la relation maternelle. Le faire et l’avoir avaient pris depuis longtemps le pas sur l’être, dans la reproduction transgénérationnelle des places dans le couple. La rupture est vécue comme une effraction. L’urgence qui y correspond relève paradoxalement d’une tentative orale à combler le manque, un “tout jouir” ambivalent. Lydie n’existe pas encore comme personne autonome dans la dimension de ses désirs et ses plaisirs. Elle se dédie à l’autre mais n’existe pas dans la relation à l’autre. Ces prises de conscience l’amènent à s’approprier progressivement la séparation et à envisager d’exister au-delà de son identité maternelle, à envisager qu’un couple ne soit pas seulement un couple parental mais aussi un couple conjugal.
Quand un couple fonctionne, un espace et un temps transitionnels existent vraiment. Le Nous et les Je peuvent coexister. Et la créativité du couple peut se développer dans le sens où chacun est un organisme autonome et en lien avec l’autre, y compris en lien avec l’organisme que constitue le couple. Je reprends là tout le travail d’Antonio Mercurio. L’harmonie du couple est possible s’il y a deux personnes et le couple, comme organisme à part entière donc il y a trois entités qui constituent le couple. Autrement, dans le rapport fusionnel ou le rapport narcissique à deux, le couple n’existe pas. C’est une enveloppe ou un miroir.
L’harmonie du couple se joue à trois : toi, moi, nous. De même, les rapports du couple doivent être multiples : rapport amoureux, rapport sexuel, rapport aux enfants, rapport aux projets, rapport aux familles, aux amis, aux collègues…
Comment l’harmonie peut-elle désormais se parler dans un nouveau contrat conjugal ?
Raphaël et Sylvie viennent me consulter alors qu’ils ont divorcé depuis deux ans et partagent la garde de leurs deux enfants. Elle vit seule et lui, a rencontré un compagnon depuis un an. Sylvie vit très mal l’homosexualité de son ex-mari et refuse que cet homme côtoie ses enfants. Le travail thérapeutique va consister à nommer les raisons de la séparation qui n’ont pu être évoquées précédemment et non pas, comme le réclamait Sylvie, un réquisitoire contre l’homosexualité de son ex-mari, requérant aussi ma complicité, dans cette “affaire”. Parce que chaque partenaire a pu nommer ses souffrances et se nommer à l’autre, comme cela n’avait pu se passer lors de leur vie de couple, alors ils ont pu enfin se parler, se voir, se faire exister et accepter l’autre différent de soi. Le soutien mutuel qu’ils se sont apportés pendant le travail thérapeutique a permis de les faire exister chacun. Une nouvelle relation est née, entre adultes plus autonomes, et a permis au couple parental de gérer ensemble la famille commune, tout en acceptant que le couple conjugal soit séparé.
Pour un couple, passer des dépendances à l’autonomie, c’est passer de la passion à l’harmonie en traversant les crises du couple donc en élaborant l’angoisse de séparation. Quitter l’angoisse de séparation, c’est élaborer les liens négatifs notamment les besoins fusionnels et narcissiques mais aussi les répétitions personnelles ou générationnelles. C’est constituer des liens positifs de reconnaissance de l’autre différent de soi –c’est à mes yeux, la véritable altérité-, et d’engagement à l’égard de l’autre dans les projets communs, engagement plus large dans le soin et l’entretien portés au couple, dans le rapport amoureux et le rapport sexuel. Le couple alors soigne également chaque personne de ce couple. Il ne s’agit pas de renoncer à soi mais au contraire de se construire et de se développer avec l’autre dans une co-création personnelle.
“Ni sans toi, ni avec toi” devient “Avec toi et sans toi”, je reprends, là, Serge Hefez dans sa description d’un passage de la destructivité et de la haine à la créativité et à l’amour. Le pouvoir dans le couple doit résider dans la constitution du contrat conjugal qui établit et instaure les règles de la vie relationnelle, c’est-à-dire celles de l’espace-temps conjugal, d’une part, et dans le scénario créatif d’un nouveau film d’amour, dans la catégorie documentaire et fiction, support long métrage, d’autre part ! Un travail renouvelé est nécessaire au couple, travail de redéfinition et de réaménagement permanents, pour constituer une vie, une évolution, un développement au lien conjugal et à soi.
Le lien conjugal nous constitue et nous permet une véritable autonomie donc une véritable créativité, dans une dépendance positive, partielle, renouvelée, gratifiante dans le sens du libre engagement amoureux et sexuel.
Bibliographie
Jean-George Lemaire, Le couple : sa vie, sa mort, Payot, 1979
Groupe Méditerranéen de la SPP, La séparation, In Press, 2003
Revue Française de Psychanalyse, Addiction et dépendance, PUF, 2004
Alberto Eiguer, Evelyn Granjon et Anne Loncan, La part des ancêtres, Dunod, 2006
Monique Dupré la Tour, Les crises du couple, Erès, 2005
Serge Hefez avec Danièle Laufer, La danse du couple, Hachette, 2002
Antonio Mercurio, Le mythe d’Ulysse et la beauté seconde, Editions de la SUR, Rome 2005